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Samba Félix
NDIAYE
(Sénégal)
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En
2007, Samba Félix Ndiaye préside le jury lycéen
au Festival des cinémas d'afrique du Pays d'Apt. |
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Né
à Dakar (Sénégal) en 1945, Samba Félix
Ndiaye a suivi des études de cinéma à lUniversité
de Paris VIII, puis de droit, économie et ethnopsychiatrie à
Dakar. Sans doute le plus important cinéaste documentariste dAfrique,
il ne cesse de manifester son intérêt pour la culture populaire,
pour les traditions, et toujours la plus totale indépendance desprit,
une curiosité et une soif absolue de comprendre.
Il a réalisé notamment, Geti tey qui peint la pêche
aujourdhui et qui a obtenu le Prix Spécial du Jury du festival
FIFEF de Dakar et la Palme dOr du festival de Nice en 1990 ou encore
une série de documentaires, Trésors des poubelles,
qui célèbrent le savoir faire de la récupération
et qui reçut une mention spéciale au Festival du Réel
et le Grand Prix du Documentaire au Festival dAmiens, et en 2003
Rwanda
pour mémoire.
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Hommage à Samba
Samba
Félix Ndiaye est mort ce vendredi 6 novembre à Dakar.
Il avait 64 ans, plein de projets et toujours cette envie de partager
son amour des autres, de lAfrique , du cinéma.
Samba est le père du cinéma documentaire africain.
Il filmait à hauteur dhomme avec un respect infini de chacun,
une soif de comprendre et de faire comprendre. Linjustice et les
abus de pouvoir lindignaient et il trouvait les images et les
mots pour le dire simplement, en toute liberté.
Tout son cinéma se place dans lespace défini par
une double démarche, qui nen constitue en fait quune
seule , à la fois cohérente et ouverte :
la connaissance et la reconnaissance des qualités , des potentialités
de la culture des peuples sénégalais et africains,
la réflexion lucide sur les raisons des impasses, voire des crimes
dans lesquels ces peuples, si souvent trompés ou trahis, ont
été entraînés .
Ainsi, son premièr « chef d oeuvre » Trésors
des poubelles (1989) est un hommage à linventivité
et au sens de la beauté des artisans sénégalais
de la récupération.
Et son dernier long-métrage Questions à la terre natale
(2007), une interrogation sur les raisons de léchec
des indépendances africaines et les voies possibles dun
autre développement .
Ngor, lesprit des lieux (1994), Lettre à Senghor
(1997), Rwanda pour mémoire (2003) sinscrivent dans
cette démarche dun intellectuel dont le talent de cinéaste,
la proximité des gens, la sensibilité généreuse
faisaient de chaque film une uvre belle de sa compréhension
de la vie et de lhistoire, et de son espoir en lhomme et
la femme.
Tous ces films de Samba ont été présentés
au Festival des cinémas dAfrique du pays dApt en
2006 et 2007. Pour cette dernière édition, la 5ème,
Samba avait aussi été un merveilleux président
du jury lycéen.
Il avait beaucoup damitié pour le Festival qui la lui rendait
aussi, totalement.
Samba était la générosité et la modestie
mêmes, un homme bon, croyant à la possibilité de
chacun de se dépasser, un humaniste, au plus haut sens du terme,
quelquun dexceptionnel, dinoubliable.
Rentré complètement au Sénégal il y a un
peu plus de cinq ans, il consacrait une part importante de son temps
et de son énergie à former de jeunes cinéastes
, à les accompagner dans leurs travaux, transmettant bien plus
que son savoir, lintégrité et la générosité
dun cinéaste et dun homme, parmi les autres.
Son départ prématuré est une grande perte pour
le cinéma , pour son pays et pour lAfrique.
Dominique
Wallon
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SAMBA
FÉLIX NDIAYE, UN AMI, UN MAÎTRE.
L'hommage des cinéastes au festival d'Apt
LA NOUVELLE DU DÉCÈS SUBIT DE SAMBA FÉLIX NDIAYE
LE 6 NOVEMBRE 2009 NOUS A FAUCHÉS EN PLEINE INAUGURATION DU FESTIVAL
DES FILMS D'AFRIQUE EN PAYS D'APT : SON DIRECTEUR, DOMINIQUE WALLON,
LA VOIX BRISÉE PAR L'ÉMOTION, VINT L'ANNONCER APRÈS
LA PROJECTION DU MAGNIFIQUE FILM D'OUVERTURE, GARE CENTRALE, EN
HOMMAGE À YOUSSEF CHAHINE.
SAMBA FÉLIX NDIAYE AVAIT MARQUÉ LE FESTIVAL AUQUEL IL AVAIT
PARTICIPÉ DEUX ANNÉES CONSÉCUTIVES, ET AVAIT PRÉSIDÉ
LE JURY LYCÉEN. PERSONNE À APT N'A OUBLIÉ SA SIMPLICITÉ,
SA GÉNÉROSITÉ, SON HUMOUR ET SON ÉCOUTE. PERSONNE
N'A OUBLIÉ SES FILMS.
AVANT DE DÉMARRER UNE TABLE RONDE SUR LE CINÉMA DOCUMENTAIRE,
LES RÉALISATEURS PRÉSENTS AU FESTIVAL ONT RENDU HOMMAGE
À LEUR COLLÈGUE DISPARU, APRÈS UNE INTRODUCTION D'OLIVIER
BARLET.
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Olivier Barlet
: Je me souviens que Samba Félix confiait au public avant une
projection que Geti Tey (1978) et sa série Trésor
des poubelles (1989) étaient le retravail de souvenirs d'enfance.
Effectivement, son regard a gardé la même attention sans
préjugés, la même vitalité sans présupposés.
Plaisir d'un cinéma qui n'assène pas de message, d'un
regard-partage avec la personne filmée, d'un regard qui dit tout
simplement "ça me regarde" ! "Je ne filme que
les gens que j'aime", disait-il encore : sa caméra était
à hauteur d'homme, dans tous les sens du terme. Pour Les Malles,
plutôt que d'amener projecteurs et pieds de caméra dans
un lieu qui ne s'y prêtait pas, il avait demandé à
son équipe de chercher une natte de plage et mis la caméra
à même le sol, à la hauteur de ces artisans au travail.
Et Les Malles résonnent de cette relation : "Mon
film ne fait que rendre ce que les gens me donnent, leur regard",
dit-il. On pense à la phrase célèbre de Serge Daney
: "ces films qui nous regardent".
Dans Lettre à Senghor, alors qu'il se posait la question
de savoir comment aborder un homme qu'il avait politiquement combattu
lorsqu'il était étudiant, il demandait conseil à
Djibril Diop Mambety qui lui répondait : "Notre témoignage
doit être à la hauteur de l'homme".
Installé avec sa famille à Paris mais très soucieux
de la formation des jeunes générations et d'une relève
cinématographique, il était revenu vivre à Dakar
pour y diriger le Média Centre qu'il espérait pouvoir
transformer en une véritable école de cinéma offrant
une formation sur trois ans. Il s'est battu pour cela mais ses espoirs
avaient été déçus et, ayant compris qu'il
avait été trompé, il avait préféré
démissionner. Cette douloureuse expérience de retour au
pays ne l'empêchait pas d'ouvrir sa porte aux jeunes cinéastes
qui venaient volontiers lui demander conseil. Certains le considéraient
véritablement comme un père.
Il disait dans nos entretiens (rassemblés dans le zoom dédié
au cinéaste) que ses deux philosophes de référence
étaient son grand-père et sa grand-mère, citant
volontiers cette dernière quand elle lui disait : "Il faut
que la personne à qui l'on parle ait des oreilles". Effectivement,
il n'avait pas la prétention de parler à tout le monde,
mais comme le souligne le documentariste Henri-François Imbert
dans le livre qu'il a consacré à son uvre (Samba
Félix Ndiaye, cinéaste documentariste africain, Ed. L'Harmattan,
collection Images plurielles), il tenait à "filmer la résistance".
Il nous ouvrait en cela à la fois une méthode et une voie.
Jean-Marie Teno : Depuis que j'ai commencé à
faire des films en 1985, j'ai bien connu Samba : nous nous retrouvions
à de nombreuses reprises. Il venait vers moi et me disait toujours
de soigner la forme. Cela m'agaçait car il avait toujours quelque
chose à dire sur la structure de mes films, mais cela me poussait
à chercher davantage et trouver ce qui ne fonctionnait pas complètement.
Il me disait : "soigne ta droite", comme à un boxeur
! Après Vacances au pays et Le Malentendu colonial,
il me disait : "Oui, là je te sens ! Ça commence
à venir !" On se parlait et se demandait comment trouver
cet équilibre entre la forme et le fond. Sa présence était
rassurante car il traçait un chemin. Il était là,
tout simplement. Avec mon dernier film, Lieux saints, j'ai l'impression
de me rapprocher de ce que Samba disait et j'attendais le moment où,
à la faveur d'un festival où nous nous rencontrerions,
nous pourrions en parler. Sa disparition est un choc, dans une année
déjà terrible avec celles d'Adama Drabo et de Chantal
Bagilishya. On regarde devant et on se demande où on va. Nos
cheveux blanchissent et notre responsabilité fait peur. On va
continuer à travailler en gardant en mémoire celui qui
a ouvert le chemin du documentaire en Afrique.
Osvalde Lewat : Notre première rencontre date des
Journées cinématographiques de Carthage à Tunis,
alors qu'il présidait le jury documentaire. Le film que je présentais
avait reçu le Tanit d'Or. Ses films avaient nourri mon propre
travail et de le rencontrer était déjà un grand
honneur mais ce prix venant de lui était pour moi considérable.
On parlait des jeunes cinéastes, qui ont très peu d'occasions
de voir ce que leurs aînés ont fait, ce qui les conduit
à devoir inventer ex nihilo, en inventant tout. J'espère
que sa disparition poussera à ce que ses films soient davantage
disponibles.
C'est quelqu'un qui était dans la transmission, dans le partage.
Depuis les JCC, nous avions échangé de nombreux e-mails.
C'était quelqu'un qui n'arrêtait pas de nous repousser
dans nos retranchements artistiques. Chaque fois qu'il me posait des
questions, il m'ouvrait des perspectives artistiques et intellectuelles.
Ainsi, même si je l'ai peu connu, il a beaucoup compté
pour moi.
Jihan El Tahri : Je saisis l'occasion pour le remercier.
Je fais la plupart de mes musiques de film à Dakar et la dernière
fois que j'y étais, il m'avait invité à partager
la journée avec lui. Cela m'a permis de voir comment il travaillait
avec les étudiants et ce fut un grand bonheur pour moi.
Brahim Fritah : Je ne le connaissais pas mais, à
vous entendre, je regrette de n'avoir pas vu ses films. Il nous faudrait
des rétrospectives qui mettent en valeur ses films et les placent
en perspectives. Beaucoup de réalisateurs en Afrique s'usent
devant les difficultés et la vision des uvres des aînés
donne de l'énergie. J'espère pouvoir voir ses films bientôt.
Nadia El Fani : C'est un des rares documentaristes africains
dont les uvres étaient diffusés dans de grandes
chaînes de télévision. Il était dans le cinéma
international et non catalogué comme on peut l'être souvent.
Pascal Privet : Je l'ai rencontré à l'occasion
de festivals, notamment à Apt, mais n'ai jamais pu le recevoir
aux Rencontres de cinéma de Manosque. C'est une frustration car
j'avais moi aussi été frappé par la rencontre avec
lui, sa parole forte, sa façon d'être, à la fois
douce et profonde. Andrée Davanture m'avait fait découvrir
la série du Trésor des poubelles et j'avais mis
Les Malles en ouverture en 1990, à la troisième édition
des Rencontres cinéma de Manosque, alors qu'il ne pouvait pas
venir car il travaillait. Ses films étaient renversants de beauté
et d'évidence, car c'était une vraie rencontre de cinéma,
tournés avec un grand soin de l'image et un partage du regard
d'une force magnifique.
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